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Secteur culturel : « la billetterie peut apporter des réponses économiques et sociales »
Adeline Durand a mis les pieds dans la billetterie par hasard en 2011, d’abord pour aider une amie sur le festival Belle-Île On Air. Ce « coup de main » a duré huit ans et a par la suite engendré une panoplie d’expériences, notamment auprès du festival Terres du Son, de la SMAC Temps Machine du festival Interceltique, ou encore du Pannonica. Après plus de dix années dans le secteur, Adeline a posé ses valises à la Cité des Congrès de Nantes en septembre 2022, en qualité de responsable de la billetterie.
Forte de ce riche parcours, Adeline a rejoint cet été l’équipe pédagogique d’ARTES pour reprendre l’animation et proposer une réactualisation de la formation en billetterie et accueil des publics, jusqu’ici assurée par Jean-Christophe Rouvet. En cette fin de mois de septembre, à quelques semaines d’une première intervention qu’elle attend avec impatience, Adeline nous a rendu visite. L’occasion pour elle de nous livrer son ressenti sur les évolutions de la profession et de nous donner, déjà, quelques indices sur son approche pédagogique.

Dans quelques semaines tu animeras ta première formation chez ARTES. Il y a quatre ans, tu étais venue en tant que participante. Qu’est-ce que cela t’inspire de passer l’autre côté ?
« Je suis très heureuse et enthousiaste de pouvoir vivre cette expérience car j’ai toujours voulu transmettre. Il y a forcément un peu d’appréhension parce que c'est ma première formation en tant qu’animatrice. Même si, sans m'en rendre compte, j’ai dû former plus d'une centaine de personnes sur le terrain, c’est totalement différent d’être devant un groupe pendant trois jours. J'espère pouvoir satisfaire les participants. J’ai envie de mettre mon expérience à profit, de donner des petits tips pour la relève. Je trouve que ça a du sens dans l'évolution de ma carrière. »
Tu as toi-même été dans cette position de débutante quand tu es arrivée, un peu par hasard, dans le métier…
« Tout à fait. J’ai découvert l'évènementiel autour de la vingtaine dans le monde associatif, mais le métier de la billetterie s’est véritablement présenté sur le festival Belle-Île On Air. De toute façon, il n'existe pas de formation universitaire à la billetterie. C’est un métier que l’on ajoute souvent comme une casquette supplémentaire à un poste en production ou en communication. C'est un poste très transversal qui demande beaucoup compétences diverses. En billetterie, on travaille main dans la main avec tout le monde : le public, la technique, la direction, les partenaires, la communication… »
« Notre métier n’absorbe pas que les entrées mais aussi, plus globalement, toutes les transactions et les flux de publics ou du staff le jour de la représentation »
Tu dis qu’il n’existe pas de formation universitaire. C’est pourtant un métier où il y a beaucoup de règles à connaître…
« Oui, mais ces règles vont être répercutées sur différents postes. Dans une structure comme la Cité des Congrès, nous avons des services en interne qui nous accompagnent sur les aspects fiscaux et juridiques du métier. Par contre, dans un petit festival où il n’y a que trois salariés à l’année, les missions liées à la billetterie sont ajoutées à un poste existant. Dans ce cas-là, on est souvent amené à bidouiller, et la billetterie peut devenir un poids sur les épaules d’une personne qui ne la maîtrise pas forcément. Ça peut être très anxiogène, et pour moi, l'objet de cette formation est de rassurer ces personnes-là, d’alléger leur charge mentale. On peut faire simple et efficace sur la billetterie. En formation, je vais chercher à dédiaboliser son aspect comptable et juridique. »
C’est un métier qui a beaucoup évolué depuis tes débuts…
« Énormément. Par exemple, j'ai commencé avant le plan Vigipirate qui est constant depuis 2015. Ensuite, on a dû s’adapter au pass sanitaire et, de plus en plus, à des perturbations climatiques (annulations d’évènements). Mais il y a aussi l’aspect technique lié à l’évolution de la digitalisation. J'ai assisté à la naissance du cashless, qui est directement lié à la billetterie. Aujourd’hui, notre métier n’absorbe pas que les entrées mais aussi, plus globalement, toutes les transactions et les flux de publics ou du staff le jour de la représentation. »
Nous avons beaucoup parlé de la billetterie, mais la formation traite également de tout le volet accueil des publics…
« Oui, c'est une composante très importante du métier. La billetterie, c'est aussi du marketing. Il est primordial de connaître les différents publics et leur typologie. Il faut être en capacité de répondre à leurs besoins, peu importe leur profil. Cela peut typiquement passer par une offre spéciale. C'est très important de bien connaître son public pour pouvoir l'atteindre, et de connaître les habitudes des différentes typologies de publics pour en conquérir de nouveaux. »
« Notre métier s’adapte aux évolutions techniques et sociétales, il va devoir s'adapter et se réinventer continuellement »
Il y a donc une étude à faire sur les publics ?
« C’est assez simple à faire. Il suffit de regarder un peu dans les archives de l'évènement. Pour un festival jeune public, on sait très bien qu'on va essayer de toucher la famille. Que va-t-on proposer pour les attirer ? Si je veux toucher des étudiants, évidemment, il faut penser à une offre passculture. Il y a plein de réflexes à acquérir pour ouvrir la porte aux publics, car c’est grâce à eux que nous sommes encore là aujourd’hui. Il ne faut pas le perdre de vue. »
As-tu prévu de faire du cas par cas en formation pour accompagner les gens sur leurs problématiques particulières ?
« En formation, je compte adapter mes exercices en fonction du domaine des gens. Un théâtre qui a une programmation à l'année et des abonnés n’aura pas du tout la même perception des choses qu’un festival d’été, par exemple. Je prévois donc de diviser les groupes en fonction de leurs besoins sur les exercices « cas pratiques ». C’est un travail de réflexion collective pour répondre à leur problématique. Après, on fera un bilan devant le groupe de manière à ce que tout le monde ait les éléments de réponse et une vision globale. Je dirais que ma formation est construite pour faire travailler les méninges. Cela reflète bien ma manière d'apprendre, et c'est aussi comme ça que je fonctionne avec mes équipes sur le terrain. »
Quels sont, selon toi, les principaux enjeux pour les métiers de la billetterie en 2025 ?
« Je pense que c'est un métier qui risque d'aller bien au-delà de la billetterie. Avec le développement des technologies, notamment des évènements en streaming, il y a un changement de consommation de la part du public. Notre métier s’adapte aux évolutions techniques et sociétales, il va devoir s'adapter et se réinventer continuellement. Il y a plein de questions à se poser dans cette période un peu charnière, et je pense que la billetterie peut apporter des réponses économiques et sociales. »